
Besoin de contact physique : La première fois qu’on m’a embrassée, je suis morte
Besoin de contact physique, dès notre naissance, ce contact là, c’est un appel dont nous avons tous besoin, plus ou moins, mais que nous avons tous en commun. Et si l’on creuse deux minutes le sujet, toucher et être touché cela va bien au-delà du besoin biologique et physiologique, car c’est à prendre dans tous les sens du terme. Du coup, que se passe-t-il en cas d’impossibilité de contact physique ?
La première fois qu’on m’a embrassée, je suis morte, est un roman de Colleen Oakley. Un roman mêlant amour, recherches médicales (allergies et autisme) et quête de soi.
Présentation de l’auteur :
Colleen Oakley vit aux Etats-Unis, à Atlanta. Elle est journaliste et écrivain. Nombre de ses articles, essais et interviews sont paru dans le New York Times, Marie Claire et d’autres journaux. Avant de devenir auteur, elle était rédactrice en chef de Women’s Health & Fitness et rédactrice chez Marie Claire. La première fois qu’on m’a embrassée, je suis morte est son deuxième roman.
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Résumé de La première fois qu’on m’a embrassée, je suis morte
Fantasque et drôle, Jubilee Jenkins souffre d’un mal extrêmement rare : elle est allergique au contact humain (pour résumer aux gens). Après un épisode qui a failli lui coûter la vie, elle décide de ne plus sortir de chez elle. Mais à la mort de sa mère, Jubilee doit affronter le monde et les gens. Elle trouve refuge à la bibliothèque municipale, où elle décroche un travail, et y rencontre Eric Keegan, un homme divorcé qui vient de s’installer en ville avec son fils adoptif, un petit génie perturbé. Bien qu’il ne comprenne pas pourquoi Jubilee le tient à distance, il est sous le charme… Ces trois-là n’étaient pas destinés à se croiser et pourtant seule leur rencontre va leur permettre de s’ouvrir à la vie et à l’amour, formant ainsi un trio irrésistible.
Extraits, avec ce besoin de contact physique et la recherche de traitement :
– Je pense qu’il est… impeccable.
– « Impeccable » ? glapit Madison. Cet homme est quoi pour toi, un costume sur mesure ? Un placard bien organisé ? Tu as quel âge, onze ans ?
Elle se tort de rire.
– Arrête, protesté-je en souriant malgré moi. Bon, d’accord, je l’aime bien. Je ne sais pas… Il me réchauffe.
– Oh, très bien. Il y a du mieux. Il a été promu manteau. Poêle à bois.
***
– On fait quoi maintenant ? demandé-je d’une voix brisée.
J’ai à peine conscience de mes larmes, qui s’écrasent au sol.
Eric se lève, et je sais que c’est terminé. Nous allons nous dire « adieu ». Je regrette presque qu’il soit venu. Presque.
– Maintenant, répond-il en s’emparant du plaid posé sur le dos du canapé, je vais t’étouffer sous une couverture.
Il déplie le plaid pour en tenir un coin dans chaque main, et écarte les bras.
Par réflexe, je recule. Puis je me souviens de notre conversation dans la voiture, de mon radotage au sujet de ma mère. Un petit rire m’échappe, puis un autre, et bientôt je ris aux éclats.
– Viens là, dit-il.
Les jambes flageolantes, je me laisse tomber dans la couverture, contre lui. Il m’enveloppe comme un burrito et me serre fort contre lui. Je suis toujours secouée d’éclats de rire, mais il ne me lâche pas.
Pas même quand il se met à rire à son tour. Pas même quand nous reprenons notre sérieux.
***
« Elle tolérait des quantités minuscules, mais elle réagissait chaque fois qu’on tentait d’augmenter les doses. Au bout de quelques années, on a enfin pu augmenter le dosage, mais on était très loin d’une guérison. Elle ne pouvait toujours pas serrer une main sans que cela provoque une grave réaction. »
1) Approche subjective de ce livre
Avertissement : Ne lisez pas ce qui suit si vous êtes trop influençable. Passez directement à l’approche objective qui se trouve plus bas. Ceci est une approche subjective, donc qui ne concerne que mes sensations/impressions personnelles que je me dois de fournir pour être franche, pour être honnête. Elles n’engagent que moi.
Un titre qui ne passe pas inaperçu
J’ai décidé de me plonger dans cette lecture parce que le titre m’interpellait. Eh oui ! Le titre est très bien vu ! Je veux dire qu’il questionne obligatoirement. Il sort de la norme. Il fait un gros clash dans notre cerveau. C’est quoi ce truc ? De quoi elle nous parle, là, Colleen Oakley !? Et, si je fais ma terre à terre, c’est extrêmement bien vu au niveau marketing car forcément, cela va aimanter les regards…
Peu importe que le titre soit long (alors qu’on nous conseille toujours – dans le monde de l’édition – de mettre des titres courts pour qu’ils soient bien mémorisés, sauf ! pour les roman du genre chick-lit qui se doivent d’avoir un titre à rallonge), sa formulation se grave forcément dans notre mémoire.
Un petit côté Jules Verne avec l’aspect recherches/nouveauté scientifique
Nombre d’auteurs aiment à mêler les dernières découvertes scientifiques à leurs histoires. C’est d’ailleurs bien souvent un jeu entre les écrivains – en particulier de SF – et les scientifiques. Les uns se nourrissants des idées des autres pour avancer, qui dans de nouvelles recherches, qui dans un nouveau livre, une nouvelle histoire. En ce sens, ce roman rejoint pour moi ceux de Jules Verne. La différence ? L’époque, les grands sujets du moment et l’idéologie qui va avec, plus le public visé.
Jules Verne titillait les jeunes lecteurs, puisque ses livres visaient le jeune public (tout en attirant les adultes) avec de grandes avancées technologiques au milieu d’aventures en tout genre. Colleen Oakley vise un public féminin adulte (plus précisément encore, de jeunes adultes, me semble-t-il), adorant les romances, le tout avec une touche scientifico-imaginaire. Ici, l’auteur nous parle de problèmes d’allergies, une problématique très dans l’air du temps et, d’autisme, un autre grand problème très actuel.
Médecine alternative versus médecine classique
Le milieu médical a donc une grande place dans ce roman, tout en étant totalement imaginé de bout en bout. La maladie, l’allergie de l’héroïne, Jubilee, n’existant pas : allergie au contact des êtres humains (des cellules, des peaux mortes, de la salive, etc.). Dans le même temps, dès le début du livre il est fait mention de l’EFT tapping, une technique tout à fait efficace lorsqu’elle est pratiquée correctement (et qui est bien plus efficace en peu de séances que x années chez un psy ! – si vous voulez en savoir plus, demandez-moi, je me ferais un plaisir de vous renseigner), ce qui n’est pas du tout le cas avec l’héroïne de ce livre, Jubilee.
Il y a donc un parti pris dès le départ, une forme de dénigrement de l’EFT, donc de la médecine dite alternative par rapport au dogme du monde médical, par rapport à toute la panoplie habituelle : psy (si si si, aussi curieux que cela paraisse pour certains) + médecine allopathique.
Le fait de servir de cobaye par la science est néanmoins régulièrement cité, d’où les années de refus de Jubilee face à tout ce système, et aux médicaments omniprésents, pour finalement tout accepter… Le psy pour Aja (le fils autiste d’Eric alors que l’autisme, le syndrome d’Asperger et la schizophrénie, par exemples, sont des effets secondaires d’une alimentation délétère, comme si, en comparaison, nous devenions les vaches folles créées par les humains il y a quelques années, en donnant à manger aux vaches – qui sont des herbivores -, des farines dites animales, donc constituées de déchets à base d’animaux…), le traitement médicamenteux pour Jubilee (alors que les allergies viennent du même problème, une alimentation délétère, et qu’il suffit juste de changer d’alimentation – voir lien précédent).
Un mélange d’imaginaire et de profonde réalité avec ce besoin de contact physique qui touche tout le monde
Toucher c’est entrer en contact physiquement avec autre chose, quand il s’agit d’un objet voir d’un animal, ou avec l’autre, quand il s’agit d’un être humain. « Toucher et être touché cela fait partie du langage du corps qui permet de nourrir les besoins émotionnels, de valider l’affection, d’éloigner les peurs et de favoriser la sécrétion d’ocytocine. Lorsque l’être humain manque de contact physique avec autrui, cela augmente son niveau de stress et donc intensifie son mal-être. » Nous dit-on en gros sur le net, lorsque l’on tape « besoin de contact physique ».
Alors quand le toucher n’est possible qu’en portant des gants ou en s’enroulant dans une couverture, il est clair que cela modifie considérablement notre rapport à nous même, aux autres, au monde.
Se laisser emporter par l’auteur en mettant de côté tout esprit critique personnel
Donc si l’on fait abstraction des erreurs monumentales qui vont de paire avec le dogme habituel (l’industrie du monde dit médical et tout ce que cela englobe : laboratoires pharmaceutiques et compagnie) dès qu’il est question de bien-être humain. Si l’on entre de plein pied dans le récit de l’auteur, un récit qui va dans le sens de la pensée ambiante, celle de la majorité des gens de notre époque, dans notre société dite civilisée et développée. Alors ce livre est agréable à lire.
Il fait partie de cette approche dite maintenant feel-good book (ouille ! merci les anglicismes), pour dire : un roman qui fait du bien.
Et de fait, une fois mis de côté tout ce qui précède, j’ai passé un agréable moment de lecture. Une lecture détente.
2) Approche objective du livre (tant que faire se peut), La première fois qu’on m’a embrassée, je suis morte
Chaque être est unique
Chacun d’entre nous est un être à part, unique. Pourtant, il est parfois nécessaire de le faire remarquer de façon tranchée, voir violente pour que cela fasse sens à tout un chacun. Jubilee est une femme à part, unique. Jubilee ne peut pas être touchée par autrui sans risquer de perdre la vie, sans risque de perdre sa vie ! Du coup, ça donne à réfléchir. Et ça la met dans des situations qui peuvent paraître inextricables voir, qui nous rappellent nos propres problèmes sous un angle nouveau.
Aussi différents que nous soyons, nous attirons à nous nos semblables
Autre point essentiel, nous attirons toujours à nous des personnes qui nous ressemblent. Donc des personnes brisées ou cassées intérieurement vont aimanter des personnes avec un profil similaire. C’est le « qui se ressemble, s’assemble ».
Comment fait-on pour se relier aux autres quand tout contact semble impossible ? C’est typiquement le besoin de contact physique et mental, le besoin de faire partie d’un groupe qui ressort là et est traité par l’auteur.
Est-il possible d’arriver à échanger avec autrui quand ce qui fait sens pour soi est une langue étrangère pour les autres ? En particulier avec le cas de l’autisme d’Aja qui arrive parfaitement à communiquer avec Jubilee, qui a une autre forme de vie seule, dans son monde avec elle-même, depuis neuf ans.
Comment comprendre que le danger ne vient pas forcément de l’extérieur mais de soi ? Et qu’il suffit de changer intérieurement pour que l’extérieur suive. C’est le fameux « Connais-toi toi-même. »
Objectif atteint, un livre qui fait du bien
Un livre plaisant à lire, avec de la douleur, du mal de vivre, de l’humour et de l’amour. On se demande où va nous emmener l’auteur, que va devenir ce trio formé par Aja (le petit génie perturbé), Eric et Jubilee. Un trio que je vais qualifier de brûlés à vif par la vie (et Madison ! et une bonne partie des personnages finalement…) et auxquels on s’attache au fur et à mesure de notre lecture.
L’objectif est atteint, oui, c’est un livre qui fait du bien, dans le sens où il nous amène à aimer ces autres qui parfois peuvent nous tuer à petit feu, l’air de rien, que nous soyons allergique ou pas, au contact humain…
Pour lire cette recherche de chaleur humaine, ce besoin de contact physique et d’amour vu par Colleen Oakley, pour l’avoir dans ma bibliothèque, je clique ici : La première fois qu’on m’a embrassée, je suis morte
Odile